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toucher de joues entre mère et fille
logo Marion Launay

Pour le magazine PEP’S

Témoignage - Le toucher

J’ai peu de souvenirs de mon enfance… Souvent ils sont plutôt confus et je peux avoir l’impression que je n’en ai pas, notamment de ma petite enfance, que les bribes que je crois avoir sont liées aux albums familiaux et aux photos qui s’y trouvent, autour desquelles j’ai peut être construit des semblants de souvenirs…

Lorsque j’essaie de sonder ma mémoire, pour y trouver de la matière afin de mieux me connaître et comprendre ce qui nourrit aussi ma parentalité, je me retrouve souvent face à un épais brouillard…

Sur la traces de mes souvenirs ...

 

Au milieu de cette brume je ne retrouve pas de contact physique affectueux, de câlin avec mes parents… Je ne parviens pas à me voir dans leurs bras, même si je sais que je l’ai été puisque je l’entends et le devine dans les paroles que nous échangeons parfois sur cette période de ma vie de bébé, de bambin.

Ma mémoire commence peu à peu à se désembrumer aux alentours de l’école primaire, je suis plus grande, et dans la matière à laquelle j’ai doucement accès cette fois, j’aperçois peu de contacts…

Aujourd’hui j’ai deux enfants, ma vie et mes difficultés de maman me poussent à m’explorer dans l’espoir de pouvoir éclairer à la lumière de ma conscience des parties de moi qui auraient tendance à s’exprimer sans même que je le sache.

Construire une relation au toucher que je n'ai pas reçue

 

Dans ces souvenirs nébuleux où le contact physique affectueux est peu présent, je comprends mieux mon rapport au toucher. Lorsque ma fille est née, par chance ! Elle a exprimé son grand besoin de contact. Pour réussir à y répondre, alors qu’il m’apparaissait comme gigantesque et m’épuisait littéralement, j’ai trouvé le portage. L’allaitement et le portage ont été deux clés très importantes pour la construction de notre relation, et pour moi qui malgré l’envahissement physique que je pouvais ressentir parfois, m’ont permis de rester près d’elle et de construire un langage du toucher entre nous.

Aujourd’hui j’observe ma fille plus à l’aise que moi avec toute cette question du contact physique, à 7 ans elle vient encore se lover contre moi et me réveille de ses mots aussi quand j’ai tendance à retomber dans cette distance qui s’exprime par défaut. Même avec elle j’ai souvent besoin encore de « mentaliser » l’importance d’entretenir le lien physique, ce n’est pas toujours un élan spontané chez moi. Heureusement ce cheminement autour de ma parentalité me permet d’être vigilante et de poser des actes pour construire les choses différemment !

 

Accueillir sa propre relation au toucher

Ce qui est paradoxal c’est qu’avec mon compagnon ma demande de contact est très forte, comme si pour moi toute la réponse à ce besoin physiologique reposait uniquement sur cette relation là… Avec lui je vais être spontanément dans le lien, les câlins, les caresses, les petits bisous au passage, je vais souvent le prendre dans mes bras, me faufiler dans les siens. Là je n’ai aucun effort à faire ! Enfin si justement, puisqu’il a fallu qu’on s’apprivoise dans nos rapports respectifs au contact et qu’il a pu arriver que pour lui se soit trop, qu’il se sente envahi… Au delà des conflits que cela a pu susciter à de nombreuses reprises, nous sommes parvenus à ouvrir le dialogue, à explorer ensemble ce qu’il se passait pour chacun dans ce déséquilibre, à mieux comprendre nos fonctionnements et nos « bagages » respectifs.

Je trouve que c’est plus confortable pour moi de comprendre toute cette histoire, savoir que j’ai tendance à avoir besoin d’une distance interpersonnelle relativement grande me permet d’en parler assez simplement. Je m’observe avec moins de reproches et plus de bienveillance quand je sens que ma résistance est là, parce que je suis peut être fatiguée et que je ne parviens pas à aller au devant de relations, en faisant la bise par exemple ; certains jours cette ordinaire convention sociale peut me mettre en difficulté alors que d’autres elle ne me pose aucun soucis, c’est très lié à mon énergie intérieure. Peu à peu je culpabilise moins et j’apprends à m’accueillir telle que je suis, avec cette « bulle de protection » fluctuante les jours où je suis moins bien. Je sens que l’acceptation me détend et m’ouvre aussi la porte pour tenter d’autres possibles quand mon niveau d’énergie est élevé et que je suis pleine d’enthousiasme !

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